Le regard écrase chaque recoin de l’infirmerie. Au milieu du stock médical, des lits et des étagères, l’éclairage trop criard à son goût réduisent ses pauvres rétines  en cendres. Aveuglée, Ännchen plisse les yeux afin de s’offrir une meilleure vue. Un flou artistique sur les rétines, elle cille à plusieurs reprises et tente de reprendre son examen. A la manière d’une vague qui se brise contre un récif, l’inconfort se fait intense sous la peau. Comme un souffle venu se heurter à la chair, elle pousse les doigts à venir tirer légèrement sur le col blanc de sa blouse. Eviter l’asphyxie en éloignant d’un geste quelque peu malhabile la pression contre sa gorge.

Elle n’en peut plus, il faut qu’elle aille faire un tour dehors. La respiration de la petite brune est haletante, ses yeux tressautent frénétiquement à la recherche d’un point d’ancrage. Elle se sent comme submergée, perdue en pleine mer, elle suffoque. Et cette pièce trop bien rangée n’arrange en rien les choses. Ce blanc parfait, ce rangement ordonné, cet alignement de matériels aseptisés … Toute cette vision d’horreur la révulse. Alors elle quitte l’infirmerie, dépasse la sortie du QG Gaia qu’elle ne connait que trop bien, elle tourne les talons vers une direction ou une autre, sans savoir vraiment où elle va. Elle marche sans doute un peu trop longtemps, sans être apeurée, elle est plus calme maintenant. Dans un énième soupir interminable, Ännchen se masse le cuir chevelu du bout des doigts tout en observant l’environnement sauvage.  Le paysage est à couper le souffle, la végétation est luxuriante et s’étale à perte de vue. Un pas, deux pas, et son regard se fixe sur une silhouette, dos à elle. ; Elle fronce les sourcils, et observe le jeune homme silencieusement, elle ne reconnaît pas en lui un Gaia, du moins elle ne se sent pas en familiarité lorsqu’elle le voit. L’espace d’un instant, elle hésite à rebrousser chemin. Elle marche sur une branche qui craque sous son poids. Et merde …